La Dystopie des Cybertariens

Une fiction en 11 chapitres décrivant l'état du monde après la crise du Covid-19

III - Destruction des Institutions

La crise du Covid-19 a jeté une lumière crue sur les dysfonctionnements que nous connaissions déjà. Les décisions incohérentes et arbitraires des gouvernements révèlent leur profond cynisme, leur insondable incompétence et leur habitude du mensonge décomplexé. Sans leurs multiples errements, de nombreuses vies auraient pu être épargnées.

Pendant que l’économie s’écroule sous nos yeux effarés, de grands groupes industriels versent des dividendes astronomiques à leurs actionnaires, tout en profitant de l’argent public pour maintenir leur comptabilité à flot. Un tel mépris génère l’indignation, surtout lorsqu’on entend parler de futurs plans de licenciements massifs.

Les statistiques affirment que le virus se répand dans le monde entier à la vitesse de l’éclair. Une solide coordination internationale est indispensable pour prendre des décisions pertinentes et cohérentes à l’échelle continentale et mondiale. C’est pourtant tout l’inverse qui s’est produit. La cacophonie la plus assourdissante caractérise la communication entre les institutions internationales et les états.

La colère populaire gronde à l’encontre des décideurs, pendant que les médias incitent à applaudir tous les soirs, le « sacrifice des héros » qui sauvent nos vies dans les hôpitaux. Cette mise en scène autour de la détresse du personnel soignant, dégage pourtant des effluves malsaines. Les reportages insistent sur leurs conditions de travail déplorables. Des cagnottes sont créées en ligne pour leur venir en aide. Des appels aux dons et au bénévolat sont lancés afin de leur procurer du matériel et de leur prêter main forte. Des collectifs d’artistes chantent pour récolter des miettes en faveur de l’hôpital. La liste des soignants « tombés au combat » est régulièrement publiée. Comment se fait-il qu’on suscite la pitié autour de cette profession vitale, au lieu de lui garantir les conditions nécessaires au bon exercice de ses fonctions ? La tristesse générée par l’état de délabrement du système de santé, est enjolivée par des actions caritatives, des gestes solidaires et des encouragements ludiques, hautement dérisoires au vu des besoins factuels.

La colère exacerbée et la tristesse positivée sont des stratégies délibérées. Le but est de susciter des émotions fortes pour marteler un message subliminal simple : on ne peut pas faire confiance aux humains. Soit ils sont incompétents. Soit ils sont corrompus. Soit ils sont fragiles. En effet, la politique ne prend que des décisions stupides, la finance est plus hypocrite qu’égoïste, la médecine craque sous la pression injuste.

D’une façon générale, toutes les institutions sont mises à mal depuis des décennies. Comme d'habitude, le syndicat Ça Gueule Trop pousse au conflit déraisonnable tandis que son concurrent C’est Foutu Débrouille Toi multiplie les compromis inacceptables. La justice libère les criminels à tour de bras, afin de les protéger d’une éventuelle contamination en prison, quitte à mettre les citoyens en danger. Que ce soit dans la rue ou au travail, plus personne n’est à l’abri d’une attaque imprévisible dite « terroriste ». L’une après l’autre, les institutions ont été rendues défaillantes pour briser la confiance des populations. La méfiance doit régner dans tous les esprits. N'ayez confiance en rien ni personne, passez-vous des intermédiaires et des représentants pour tout faire directement vous-mêmes.

Les humains semblent aussi défaillants que leurs lois et leurs institutions. Il est catastrophique de nous laisser gérer les domaines les plus importants de notre existence. Que faire pour que le désastre que nous vivons actuellement ne se reproduise « plus jamais » ? Tout le monde le dit. Il faut changer notre façon de vivre. Les naïfs qui rêvent d'un « monde d’après plus humain » ne se rendent pas compte que les jalons de notre futur sont déjà posés.

Pendant ce temps dans la vraie vie